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07/11/2014

La non-violence - Jordane - Veilleurs Paris

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L’origine du mot non-violence est le mot sanskrit ahimsa employé dans les textes de la littérature bouddhique et hindouiste et dont il est la traduction littérale. 

Il est formé du préfixe négatif a et de himsa qui signifie le désir de nuire, de faire violence à un être vivant. L’ahimsa est donc l’absence de tout désir de malveillance, c’est-à-dire la bienveillance, le respect, en pensée, en parole et en action, de la vie de tout être vivant.

Ici la non violence se distingue du simple pacifisme. 


En étant non violent, nous nous revendiquons d’un courant philosophique qui répond a des caractéristiques claires.

Ce n’est pas simplement « ne pas poser d’actes agressifs » « ne pas casser » (des figures ou des vitrines).

Le principe de non-violence implique l’exigence de rechercher des méthodes pour agir efficacement contre la violence.

L’action non-violente permet à l’homme d’avoir une attitude responsable face à la violence des autres hommes.

En recherchant l’efficacité politique par d’autres méthodes que celles offertes par la violence, la stratégie de l’action non-violente veut réconcilier la « morale de conviction » et la « morale de responsabilité ». On ne peut pas construire la paix à l’aide de la violence. Si nous voulons la paix, nous y parviendront par des moyens de paix. La fin ne justifiant pas les moyens, nous ne pourrions y parvenir par le mensonge, la manipulation, la corruption…

C’est pourquoi, avant d’être une méthode d’action, la non-violence est d’abord et essentiellement une attitude.

Elle est l’attitude éthique et spirituelle de l’homme debout qui reconnaît la violence comme la négation de l’humanité, à la fois de sa propre humanité et de l’humanité de l’autre, et qui décide de refuser de se soumettre à sa loi.

“« Frapper ou être frappé, c’est une seule et même souillure », nous apprend la philosophe Simone Weil.

 « Quand elle s’exerce jusqu’au bout, elle fait de l’homme une chose au sens le plus littéral, car elle en fait un cadavre. Il y avait quelqu’un, et, un instant plus tard, il n’y a plus personne. » L’homme n’est plus traité comme un sujet, mais comme un objet. L’homme n’est plus considéré comme une fin, mais seulement comme un moyen. La violence détruit l’humanité aussi bien de celui qui l’exerce que de celui qui la subit : « Frapper ou être frappé, affirme encore Simone Weil, c’est une seule et même souillure. Le froid de l’acier est pareillement mortel à la poignée et à la pointe ». À partir de ce regard porté sur la violence, nous serons amenés à refuser définitivement toute justification de la violence. La violence ne peut jamais être justifiée parce qu’elle n’est jamais juste.

2- Constat de violence

Pour arrêter là le cours magistral et parler très concrètement, je vais schématiser la pensée de Jean-Marie Muller et de Lanza Del Vasto.

En gros, pour nos « adversaires », nous sommes ceux :

  • dont les droits viennent empiéter sur les leurs,
  • dont les désirs viennent contrarier leurs propres désirs,
  • dont la liberté menace leur propre liberté,
  • dont la simple existence fait peser une menace sur leur propre existence.

Nous sommes donc ici dans ce qui relève du « vital » pour eux (et quasiment de l’irrationnel !) et légitime l’application de la loi du Talion.

Nous sommes considérés comme des agresseurs, des oppresseurs, ils s’inscrivent donc dans une lutte légitime à leurs yeux. Or selon J.M. Muller « justifier la violence innocente le meurtre », et fait disparaître toute culpabilité.

Pour eux, notre simple existence est déjà une violence.

Dans la société d’aujourd’hui, la valeur de l’être humain se mesure à son opinion. Certaines opinions font de nous, pour le gouvernement actuel, pour la LGBT et autres courants de pensées, des sous hommes. Leur humanisme est tellement développé qu’ils en viennent à hiérarchiser les êtres humains eux-mêmes, ce qui est, en soi, ultra violent.

Tu es catho, pratiquant, pro-vie ? Tu es un oppresseur puisque suivre ton opinion revient à anéantir ma liberté personnelle de faire ce que je veux de mon corps, de la vie de mes parents… Tu crois en un principe supérieur qui m’oppresse.

Et comme tu n’as pas le pouvoir, je te méprise, je t’ignore et cette attitude est, à mes yeux, légitime: pour moi tu n’as pas le droit de vivre. C’est bien la raison pour laquelle nous ne verrons aucune condamnation des violences qui nous sont faites, que ce soit sur nos personnes, sur nos cimetières ou sur nos cathédrales.

3- L’attitude non-violente

Par cette loi qui vient de passer dans les conditions que nous connaissons, on nous a fait violence (définition du Larousse : Grande brutalité).

Ce constat provoque en nous une révolte légitime, cette révolte nous pousse à l’action, en tous cas nous pousse à parler, à nous découvrir.

De fait, en montrant que nous existons, nous faisons violence à nos opposants.

Nous n’avons pas à nous en excuser, nous n’en sommes pas responsables, mais nous avons à le savoir et à le prendre en compte.

Face à ce constat, 2 attitudes principales non-violentes pour réponse à la violence:

* D’une part de ne pas céder, de ne pas fuir, donc être prêt à prendre des coups (au sens propre comme au sens figuré) en acceptant courageusement de ne pas les rendre.

(Martin Luther King) « La résistance non violente n’est pas destinée aux peureux. Quiconque y aurait recours par lâcheté ou manque d’armes véritables ne serait pas un vrai non-violent. C’est pourquoi Gandhi a si souvent répété que, si l’on n’avait le choix qu’entre la lâcheté et la violence, mieux valait choisir la violence. (…)

La résistance passive peut faire croire à tort à une attitude de « laisser – faire » qui revient à subir le mal en silence. Rien n’est plus contraire à la réalité. En effet si le non–violent est passif, en ce sens qu’il n’agresse pas physiquement l’adversaire, il reste sans cesse actif de cœur et d’esprit et cherche à le convaincre de son erreur. C’est effectivement une tactique ou l’on est (…) vigoureusement actif sur le plan spirituel. Ce n’est pas une non-résistance passive au mal, mais bien une résistance active et non – violente. »

C’est un acte physique volontaire très fort que de rester et d’essuyer des insultes et des coups. Acte de bontés d’abnégation et de courage.

Lors de ma toute première veillée, le 23 avril dernier, Axel nous avait demandé de réfléchir à la raison de notre présence parmi les Veilleurs. Une raison bien spécifique et personnelle, du sens que nous donnons chacun à cette résistance non violente, que ce sens soit spirituel, intellectuel ou philosophique, ce peut être un prénom, un simple mot qui nous donne la force de rester non violent malgré la douleur ou la contradiction. Ce mot nous l’écririons sur nos mains pour le regarder pendant que les CRS nous délogeraient. Il nous donnerait du courage.

-      D’autre part de nous recentrer sur notre vocation d’être humain, qui est d’entrer en relation les uns avec les autres, dans le respect mutuel et la bienveillance réciproque. Nous relier à ce qui est vivant en nous et chez nos interlocuteurs, mettre l’accent sur ce qui nous relie par-delà toutes nos différences.

Nous appartenons tous à la même race humaine, nous partageons tous les mêmes besoins, notamment celui d’aimer et d’être aimé et respecté pour ce que nous sommes. 

Nous devons comprendre leur positionnement, comprendre leur point de vue, prendre conscience que nos adversaires sont à la fois mal-chanceux et mal-heureux, ce qui réveille notre com-passion et notre bien-veillance.

La plupart des personnes qui méprisent nos idées et donc nous méprisent, ne nous connaissent pas et sont victimes du consensus médiatique à notre égard… Et nous savons que l’idéologie tombe lorsqu’elle se confronte au réel.

Nous devons donc mettre en œuvre dans notre vie, avec un soin plus particulier en veillée, une attitude de sincérité et de respect, aucune violence, physique ou verbale, aucun objet qui pourrait faire mal quel qu’il soit, pas de sourire narquois, pas de raillerie.

Selon Lévinas, « le visage, c’est l’identité même d’un être ». La découverte du visage de l’autre dans sa vulnérabilité et sa transcendance fait prendre conscience de la possibilité et de l’impossibilité du meurtre.

Le regard de l’autre paralyse mon pouvoir et désarme ma volonté.

D’où l’importance de la bienveillance de nos visages quels que soient les circonstances qui adviennent, comité d’accueil hostile en veillée, CRS en armures qui nous délogent, sommations…

Et nos sourires ne doivent jamais, surtout pas, pouvoir être pris pour de la moquerie ou de la suffisance (le silence moqueur est en effet très violent).

Le principe de base de l’action non violente, c’est de ne pas utiliser quelque chose que nous n’aimerions pas voir utilisé contre nous-même.

Ainsi, en formation aux techniques d’actions non violentes, quelques caractéristiques se dégagent :

  • le respect absolu de l’adversaire et de tous ceux et celles qui sont impliqués,
  • la considération envers tous et toutes,
  • le refus de faire du mal ou d’humilier,
  • la volonté de prendre la douleur sur nous même plutôt que de l’infliger aux autres,
  • la conviction que chacun est capable de changement,
  • la volonté de faire appel à l’humanité de l’adversaire,
  • la reconnaissance de ce que personne n’a le monopole de la Vérité, et la volonté donc de rapprocher notre perception de la Vérité, à la perception qu’en a notre adversaire.

 

4- Le discours non-violent

« Ce que je recherche dans la vie, c’est la bienveillance, un échange avec autrui motivé par un élan du coeur réciproque. »

Marshall Rosenberg

“« Ce que je recherche dans la vie, c’est la bienveillance, un échange avec autrui motivé par un élan du coeur réciproque. »  Marshall Rosenberg

Attention, vous l’avez peut-être constaté, le dialogue n’est pas systématiquement possible. Il est possible avec une ou deux personnes, jamais avec un groupe, encore moins si ce groupe est très violent.

Quand il vous semble que la situation est trop violente, mieux vaut se taire et «lâcher l’affaire ». Lorsque nous sommes réunis en veillée, pourquoi ne pas placer un ou deux panneaux stipulant « RESPECT », « PAIX », « NON VIOLENCE ».

Surtout rester assis, position vulnérable assumée. 

Ne jamais courir, ne jamais faire de mouvement brusque,

 si vous devez parler, essayer de le faire sans plisser le front mais en gardant le sourire, autant d’enseignements que nous prodiguent les images de la TV prises a contrario.

Par contre, de personne à personne, il existe une méthode pour échanger : la CNV. L’Américain Marshall Rosenberg a mis au point un outil qui s’attache directement au langage en tant que porteur du conflit. «Changez le langage, dit-il en substance, et le conflit sera sur le chemin de sa résolution.»

Je vous encourage à taper « communication non violente » sur Google, c’est riche d’enseignements.

Par contre face à la police, et en particulier les policiers en civil, la discussion est déconseillée…

5- L’action non-violente

Notre principal problème, c’est souvent notre perception que notre adversaire est invincible. Pour nous en sortir, nous devons attirer l’attention de l’opinion publique sur notre cause.

Notre action n’a aucune chance d’aboutir si elle repose sur la persuasion. Aujourd’hui les discours sont vains, la lutte est idéologique, et donc déconnectée du réel, irrationnelle. Seule l’attitude, l’exemple, nos actes, vont avoir un impact sur l’opinion publique en tant que « confrontation au réel ».

Les grands médias nous sont hostiles, mais nous avons avec nous des moyens de communication extraordinaires, qui dépassent nos frontières pour atteindre le monde entier.

La sensibilisation de l’opinion publique, pour les Veilleurs, passe par le témoignage.

Notre présence dans des lieux clés, dans le cadre d’une désobéissance civile, peut certes susciter l’adhésion.

Mais elle suscitera surtout la répression de la part des pouvoirs publics (puisque nous désobéissons), et de la part de nos opposants, puisque nous existons.

La NV est donc une méthode dont l’objectif est de pousser la répression a un point inadmissible, insoutenable, pour l’opinion publique. 

Pour cela, la cause que nous devons défendre et les moyens que nous mettons en place doivent être inattaquables. Si notre attitude est irréprochable, la répression en sera d’autant plus choquante.

La seule désobéissance civile pourra être acceptée par le public car elle ne se situera pas dans la violence et l’agressivité mais dans la force d’une attitude bienveillante. 

je vous encourage à filmer tout affrontement. Parce que ce seront ces images, mises sur Youtube, Dailymotion, sur les réseaux sociaux, montrant la répression d’êtres pacifistes, qui feront le tour du monde.

Comme la photo de la femme en rouge pour la Turquie en ce moment, en plein gazage. Les hommes debout devant les Chars à Tien Anmen

 

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