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05/11/2014

Les deux conceptions du Droit - Philippe Pichot-Bravard

Depuis l’Antiquité, deux conceptions du droit s’affrontent.

Les uns définissent le droit comme l’expression de la volonté de ceux qui exercent la souveraineté.

Les autres considèrent que le droit est «  cela qui est juste  », qu’il est un art, l’art d’attribuer à chacun la part qui lui revient (Ulpien), l’art de ce qui est « bon et équitable » (Celse).

Dans l’Ancienne France existait une véritable « Etat de Justice » permettant, par delà l’inévitable imperfection des institutions humaines, la soumission du Souverain au Droit.


Cet « Etat de Justice » était nourri :

1- Par la conviction que la première mission du Roi, celle qui fonde sa légitimité, est de faire régner la Justice dans son royaume, ce qui implique, notamment, qu’il se soumette aux lois fondamentales et au droit naturel ;

Pour autant, la supériorité du droit naturel, rappelée par la doctrine unanime, est respectée jusqu’en 1789. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen marque véritablement une rupture. Texte de compromis, la déclaration est marquée par une tension entre l’influence de Locke (article deux) et celle de Rousseau (article six). A l’article trois, la déclaration des droits proclame le principe de la souveraineté nationale.

Cette affirmation marquait un renversement complet de l’ordre du monde : le pouvoir ne venait plus d’en-haut mais d’en bas. Dès lors, le souverain était affranchi du respect d’un ordre juridique supérieur extérieur à sa volonté. La définition de la loi s’en trouva radicalement bouleversé. Selon l’article six, « La loi est l’expression de la volonté générale ». La loi ne se définissait plus en fonction de sa finalité mais en fonction de son origine. La loi n’est plus l’acte qui participe au règne de la justice mais l’acte qui exprime la volonté du souverain. Il y avait là une tension évidente entre l’affirmation de l’existence de « droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme » et le légicentrisme contenu par l’article six. L’absence de procédure juridictionnelle de contrôle de la constitutionnalité des lois empêcha de vérifier que les volontés du législateur étaient effectivement respectueuses de ces « droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme ».

Cette absence était volontaire, comme le montra le débat du 8 août 1791. Les députés ne voulaient pas qu’un organe conservateur de l’ordre constitutionnel vînt faire obstacle à leur volonté souveraine.

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