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14/11/2014

Orthographe et féminisation des noms : ce qu’en dit l’Académie française.

L’académie française a été crée par Richelieu en 1635 afin de « donner à l’unité du royaume forgée par la politique une langue et un style qui la symbolisent et la cimentent ». 

Le dispositif imaginé par Richelieu était si parfait qu’il a franchi les siècles sans modification majeure : le pouvoir politique ne saurait sans abus intervenir directement sur la langue ; il laisse donc à une assemblée indépendante, dont le statut est analogue à celui des cours supérieures, le soin d’enregistrer, d’établir et de régler l’usage. En matière de langage, l’incitation, la régulation et l’exemple sont des armes bien plus efficaces que l’intervention autoritaire.


Transformations et réformes de l’orthographe

Depuis la première édition du Dictionnaire de l’Académie, qui représentait déjà un effort normatif sans précédent, l’orthographe s’est considérablement transformée, tant du fait d’une évolution naturelle que par l’intervention raisonnée de l’Académie, des lexicographes et des grammairiens. La réflexion sur l’orthographe doit tenir compte de données multiples et souvent contradictoires, comme le poids de l’usage établi, les contraintes de l’étymologie et celles de la prononciation, les pratiques de l’institution scolaire, celles du monde des éditeurs et des imprimeurs, etc.

L’Académie s’est employée, tout au long de son histoire, à maintenir un équilibre entre ces différentes exigences, l’expérience prouvant que les projets abstraits des réformateurs ne sauraient à eux seuls faire plier l’usage.

Au XIXe siècle, le développement de l’institution scolaire a sans doute contribué à figer quelque peu l’orthographe, tout en suscitant parallèlement de grands projets de réforme. Le système éducatif avait besoin de règles fermes qui pussent être enseignées aux élèves.

La féminisation des noms de métiers, fonctions, grades ou titres

En 1984, le Premier ministre crée une « commission de terminologie relative au vocabulaire concernant les activités des femmes ». Le décret indique notamment que « la féminisation des noms de professions et de titres vise à combler certaines lacunes de l’usage de la langue française dans ce domaine et à apporter une légitimation des fonctions sociales et des professions exercées par les femmes ».

L’Académie française, qui n’avait pas été consultée, fait part de ses réserves. Elle dénonce en particulier le contresens linguistique sur lequel repose l’entreprise : il convient de rappeler que le masculin est en français le genre non marqué et peut de ce fait désigner indifféremment les hommes et les femmes ; en revanche, le féminin est appelé plus pertinemment le genre marqué, et « la marque est privative. Elle affecte le terme marqué d’une limitation dont l’autre seul est exempt. À la différence du genre non marqué, le genre marqué, appliqué aux êtres animés, institue entre les deux sexes une ségrégation. » Aussi la féminisation risque-t-elle d’aboutir à un résultat inverse de celui qu’on escomptait, et d’établir, dans la langue elle-même, une discrimination entre les hommes et les femmes. L’Académie conteste enfin le principe même d’une intervention gouvernementale sur l’usage, jugeant qu’une telle démarche risque « de mettre la confusion et le désordre dans un équilibre subtil né de l’usage, et qu’il paraîtrait mieux avisé de laisser à l’usage le soin de modifier ».

Une circulaire du Premier ministre recommanda, en 1986, de procéder à la féminisation des noms de métiers, fonctions, grades ou titres dans les textes officiels et dans l’administration. Elle ne fut guère appliquée. Puis, en 1997, certains ministres du gouvernement préconisèrent pour leur compte la forme féminisée « la ministre », ce qui provoqua une nouvelle réaction des académiciens. Dans une circulaire du 6 mars 1998, le Premier ministre constata le peu d’effet du texte de 1986, mais recommanda à nouveau la féminisation « dès lors qu’il s’agit de termes dont le féminin est par ailleurs d’usage courant ». Il chargea la commission générale de terminologie et de néologie de « faire le point sur la question ».

Le rapport de la commission a été remis au Premier ministre en octobre 1998. Il rappelle qu’une intervention gouvernementale sur l’usage se heurterait très vite à des obstacles d’ordre juridique et pratique, et qu’on peut douter, de toute façon, qu’elle soit suivie d’effet. Il établit une nette différence entre les métiers d’une part (où les formes féminines sont depuis toujours en usage et ne posent pas de problème particulier), et les fonctions, grades ou titres d’autre part, qui doivent être clairement distingués de la personne. La fonction ne peut être identifiée à la personne qui l’occupe, le titre à la personne qui le porte, etc. ; pour cette raison, l’utilisation ou l’invention de formes féminines n’est pas souhaitable.

 

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